4 août 2011

Les pourfendeurs de l’index sur la scène internationale bénéficient eux-mêmes de l’indexation

Nous vous en avons déjà parlé dans ce blog d’été. Rien de plus logique pour le FMI que d’appliquer un système d’indexation automatique des salaires. Du moins lorsqu’il s’agit de son directeur général, DSK précédemment et Christine Lagarde depuis peu. Pas question par contre d’une application généralisée aux simples travailleurs.

Qu’en est-il des autres oracles de la scène internationale, qui semblent avoir la dent particulièrement dure contre notre mécanisme d’indexation, comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Commission européenne? La situation n’y est pas différente.

Voici les informations que nous avons reçues de la délégation des travailleurs de l’OCDE en ce qui concerne le staff de l’OCDE:

"L'ajustement annuel des rémunérations des agents de l'OCDE relève du Comité de Coordination sur les Rémunérations (CCR) organisme commun à l'OCDE, l'OTAN, le Conseil de l'Europe et un certain nombre d'agences européennes (comme par exemple l'Agence Spatiale Européenne). Le CCR a une structure tripartite:
- les employeurs sont représentés par le Comité des Représentants des Secrétaires Généraux (CRSG);
- les gouvernements sont représentés par des délégués nationaux;
- les salariés sont représentés par le Comité des Représentants du Personnel (CRP), composé de délégués des associations du personnel de chaque organisation.

Tous les ans le CCR émet des recommandations sur l'ajustement des salaires - mais aussi d’autres rémunérations (surtout les indemnités d'expatriation) et les pensions.

Concernant les salaires, la méthode du CCR est indicielle:
- Elle est d'abord déterminée par un indice commun à l'ensemble des organisations (OCDE, OTAN, etc.) qui est composé d'un panier d'évolutions des rémunérations constatées dans la fonction publique d'un groupe de pays: France (poids dans l'indice: 19,8), Belgique (8,8), Allemagne (18,9), Italie (12,1), Luxembourg (5,9), Pays-Bas (9,1), Espagne (8,7), Royaume-Uni (16,7).
- Elle est ensuite ajustée en fonction de l'inflation dans le pays d'affectation. Une clause des règles du Comité prévoit en outre un "ajustement exceptionnel" lorsque la hausse du coût de la vie excède 5% sur 12 mois, ce qui a été le cas du Royaume-Uni entre juillet 2009 et juillet 2010.

Avec ce système, les salaires du personnel de l'OCDE ont augmenté de 2% pour l'année 2010, de 2% en janvier puis de 1% en août 2009, de 1% pour l'année 2008, de 2,4% en janvier puis de 0,7% en décembre 2007, de 2% pour l'année 2006. Sur les dix dernières années 2001-2010, la hausse des salaires aura été en moyenne de 2,5% par an (un peu moins en fait, car comme indiqué précédemment en 2007 et en 2009 la hausse a été en partie différée au cours de l'année)."


Qu’en est-il de la Commission européenne? Des informations très détaillées se trouvent dans un rapport particulièrement intéressant établi par le centre d’étude européen Eurofound concernant les systèmes d’indexation automatique en Europe. Ce rapport concerne tous les pays qui ont été invités par la Commission européenne et ensuite par le Conseil européen à revoir leur système d’indexation (Malte, Chypre, Belgique, Espagne), mais les chercheurs y ont aussi ajouté des informations très brutes concernant les fonctionnaires européens. Nous citons:

"La rémunération des employés et des fonctionnaires des institutions européennes fait l’objet d’une forme combinée d’indexation salariale, telle qu’établie par les "Staff Regulations of EU officials and other employees" en vigueur depuis le 1er mai 2004.

Suite à une décision du Conseil européen basée sur des données Eurostat, les salaires des employés de l’UE sont ajustés annuellement. L’ajustement tient compte à la fois des évolutions salariales moyennes pour les fonctionnaires nationaux dans un échantillon de huit Etats membres – à savoir la Belgique, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, l’Espagne et le RU – et du coût de la vie dans le pays de travail. Etant donné que cette mesure est appliquée avec effet rétroactif, les évolutions salariales dans les services publics nationaux s’appliquent aux employés UE avec un décalage d’un an.

L’ajustement vise dans une première étape à veiller à ce que les évolutions salariales au niveau de l’UE reflètent les évolutions au niveau national. Dans un second temps, l’ajustement tient compte des différences géographiques au niveau du coût de la vie entre Bruxelles et tout autre lieu de travail dans une institution européenne, ainsi que des différences dans le temps. L’ajustement est basé sur un "coefficient de correction", qui reflète les différences de pouvoir d’achat entre Bruxelles et le lieu de travail, Bruxelles servant de ville de référence. L’indicateur ne suit toutefois pas nécessairement l’évolution générale des prix à la consommation dans un pays donné, puisqu’il tient compte des modèles de consommation des employés de l’UE dans leur lieu de travail. Les modèles de consommation sont établis sur la base d’une enquête, appelée "Family Budget Survey" (FBS) réalisée tous les cinq ou sept ans auprès des employés des institutions européennes situées en dehors de Bruxelles.

Suite à cette procédure d’ajustement, la rémunération pour une même position au sein d’une institution européenne peut varier fortement à travers l’Europe. Ainsi, un employé occupé dans une institution européenne en Bulgarie recevrait 62% du salaire payé pour la même position à Bruxelles, alors qu’un employé travaillant au Danemark recevrait 138% de ce salaire, conformément au "Council Regulation of 21 December 2009" sur la rémunération et les pensions des fonctionnaires et autres employés de l’UE."


Dans ces conditions, on pourrait s’attendre à ce que tous ces hauts fonctionnaires de l’OCDE et de la Commission européenne éprouvent un peu plus de scrupules à s’en prendre à notre système d’indexation. Manifestement, ils estiment que leurs propres privilèges ne s’appliquent pas au petit peuple des travailleurs.

Marc Leemans
secrétaire national

1 commentaire:

  1. Nous sommes dans un système paradoxal où d’un côté on stigmatise celui qui, parmi le plus grand nombre, déroge à la règle, ici les quelques valeureux Gaulois qui résistent face à la pression de la droite néolibérale poussant à supprimer le système d’indexation, et puis l’élite nichée dans ces institutions que l’on dit prestigieuses, qui travaille à maintenir ce fossé entre ces différents travailleurs. Et donc, ce qui est reproché à l’un ne l’est pas à l’autre car simplement, cet autre considère que « ce n’est pas la même chose », que lui est méritant pour toutes formes de considérations subjectives.

    Martine Evraud
    Université de Liège - CSC-Services publics

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