31 août 2011

Du pain sur la planche

Les uns après les autres, nous rentrons de congé et reprenons le travail. Lorsque nous repensons à l’été pluvieux que nous venons de vivre, du moins en Belgique, les deux catastrophes qui ont si lourdement touché la jeunesse nous viennent immédiatement à l’esprit: la fusillade en Norvège et les ravages lors du festival Pukkelpop. A cela s’ajoutent encore bien d’autres tristes événements: la famine dans la Corne de l’Afrique, les émeutes au Royaume-Uni, l’incessante spéculation contre les pays, l’incapacité de l’Europe à y faire face, les querelles politiques à Washington, le récent attentat à la bombe contre les Nations unies au Nigéria, les dégâts que les ouragans ont à nouveau causés, le prix élevé que la population libyenne a dû payer pour son appel à la démocratie, la réaction agressive du gouvernement syrien face au soulèvement populaire…

Pour le reste, force est de constater que sur les plans politique, syndical et socio-économique, les défis qui se posaient avant l’été sont loin d’avoir disparu. Ils font même de nouveau la une et n’ont rien perdu de leur gravité.

Nous avons consacré à chacun de ces défis un ou plusieurs articles de ce blog d’été 2011. Dans ce dernier article, nous les reprenons un à un. Vous saurez ainsi ce qui nous occupera au cours des prochains mois.

Double récession?

Au niveau international, le risque de "double récession" persiste, surtout si, sous la pression des marchés financiers ou de la droite, les pays se lancent simultanément dans un assainissement trop brusque et irréfléchi. Même Christine Lagarde, la nouvelle directrice du FMI, a déjà dû lancer plusieurs mises en garde à ce propos. Parallèlement, elle insiste pour que des impulsions positives soient données afin de soutenir l’économie. Dans le cadre de ces discussions se pose aussi la question de la limitation de la toute-puissance des agences de notation. Le pouvoir de ces agences semble en effet augmenter à mesure que leur crédibilité décroît. Malgré son erreur monumentale de 2.000 milliards de dollars dans son évaluation de la dette publique américaine, Standard & Poor’s semble même s’en sortir assez bien. Et, contrairement à ce qui s’était passé après l’éclatement de la crise financière, il n’existe pas même un début de réponse intergouvernementale. Le G20 semble à l’agonie.

L’euro(pe) frémit et tremble

Durant tout l’été, l’Europe a dû faire de la gestion de crise et, pour le moment, elle ne parvient pas à formuler une réponse adéquate et cohérente. Si le succès rencontré par la taxe sur les transactions financières dans les agendas politiques constitue déjà une avancée, les euro-obligations continuent à se heurter à un non catégorique.

Au début de l’été, l’Europe a adressé une série de recommandations aux Etats membres et à l’ensemble de la zone euro dans le cadre de sa stratégie à moyen terme «Europe 2020». Ces recommandations émanaient surtout des faucons de la filière Ecofin et cela se voyait clairement. La question est à présent de savoir quelles suites chacun des Etats membres donnera à ces recommandations dans les prochains mois.

Pour la fin juin, les six propositions législatives de l’Europe en matière de coordination de la politique économique (le fameux "sixpack" pour la gouvernance économique) auraient dû être mises en œuvre, mais le Parlement européen et le Conseil européen ne sont pas parvenus à se mettre d’accord. Le dossier sera donc à nouveau sur la table en septembre, mais dans le cadre d’une question plus large: comment répondre de façon cohérente aux vagues spéculatives incessantes et éviter que l’euro ne faiblisse. D’aucuns se mettent à spéculer à haute voix sur un éclatement de la zone euro. Selon certains, un ou plusieurs pays du Sud désireraient la quitter; d’après d’autres, l’Allemagne serait sur le point de faire cavalier seul (en matière de taux de change). Pourtant, la réponse ne réside pas dans un affaiblissement de l’Europe, mais bien dans son renforcement, pour autant bien sûr qu’il y ait un équilibre suffisant entre les objectifs économiques, sociaux et écologiques. C’est ce que nous répéterons avec le mouvement syndical européen lors d’une nouvelle euro-manifestation qui se tiendra le 17 septembre, à Wroclaw (Pologne) cette fois.

Un nouveau gouvernement: il est temps

Au niveau national, le premier grand défi reste bien entendu la formation d’un nouveau gouvernement fédéral, qui devra accomplir trois missions importantes et fortement liées entre elles: procéder à une nouvelle réforme de l’Etat, assainir les finances publiques et élaborer une nouvelle politique socio-économique.

En juillet, le formateur Elio Di Rupo a présenté sa note, qui contenait une série de mesures particulièrement douloureuses pour les travailleurs et les non-actifs. Nous avons donc été obligés de réagir fermement afin d’obtenir de conséquents aménagements. A présent, les discussions en vue de la formation d’un gouvernement ont repris, cette fois sans la N-VA, qui a choisi de rester sur la touche. Les autres partis semblent avoir pris conscience du fait que, face aux marchés financiers, nous ne pouvons plus nous permettre de continuer à jouer avec le feu, que nous devons progresser dans l’établissement du budget 2012 et que nous ne pouvons plus continuer à reporter certains dossiers de politique socio-économique.

Nous continuerons à suivre de près ces négociations qui devraient aboutir début octobre, afin d’en arriver à une réforme de l’Etat qui préserve la solidarité tout en restant acceptable pour les travailleurs, à un assainissement qui fera supporter les charges les plus lourdes par les épaules les plus larges et épargnera les plus faibles, et à une nouvelle politique socio-économique qui continue à tenir compte des besoins et des attentes des travailleurs et des non-actifs.

Un Pacte repensé

S’ajoute encore à tout cela un dossier très délicat: l’évaluation du Pacte de solidarité entre les générations de 2005. Celle-ci était déjà prévue pour 2011 depuis un certain temps. Elle est à présent en cours au Conseil national du travail. Les travaux devront être finalisés pour octobre, après quoi le gouvernement prendra la main.

Ce que nous devons absolument éviter, c’est que cette évaluation dégénère une fois encore en un débat qui ne porte que sur les générations plus âgées, sur les prépensions en particulier et sur les efforts que les travailleurs doivent consentir. Cette fois, il s’agira surtout d’identifier ce que les employeurs doivent et peuvent faire pour permettre aux travailleurs de rester actifs plus longtemps. La question sera aussi de savoir comment aider les jeunes à démarrer une carrière digne de ce nom.

Hausse des prix: s’attaquer à la source du problème

Outre ce débat, un autre thème constitue probablement une pierre d’achoppement importante: la réforme de l’index. L’Europe nous somme d’entreprendre de premières démarches en vue d’une réforme de l’index. Au niveau national, certains n’hésitent pas à profiter de l’occasion pour remettre en cause la liaison à l’index et, en septembre, la Banque nationale de Belgique mettra probablement encore un peu d’huile sur le feu en publiant un rapport de sa propre initiative. Or, nous estimons qu’il faut s’attaquer à la source du problème de la hausse des prix, en commençant par baisser les prix du gaz et de l’électricité. D’ailleurs, l’index n’a pas empêché la Belgique d’enregistrer des résultats économiques particulièrement brillants à l’heure actuelle, même en comparaison avec le soi-disant "modèle" allemand.

Deux ans pour le statut commun

En juillet, la Cour constitutionnelle nous a encore confrontés à un défi supplémentaire: l’harmonisation des statuts des ouvriers et employés, pour laquelle la Cour accorde encore deux ans au gouvernement et aux partenaires sociaux. Ces travaux devront donc être enfin finalisés en juillet 2013. Etant donné la complexité du dossier, il serait totalement déraisonnable d’attendre deux ans avant de s’y atteler. En effet, l’harmonisation des statuts demandera encore beaucoup de préparation politique, y compris sur le plan des chiffres. Dans tous les cas, la CSC est particulièrement heureuse que le dossier du statut commun soit ainsi redynamisé.

Tout au long de l’été, nous sommes restés en contact avec vous grâce à notre blog d’été, et vous avons exposé beaucoup de ces défis ainsi que la vision de la CSC en la matière. Ce blog a été fait de réactions et d’explications, de chiffres et de faits nouveaux. Parmi ces informations, nombreuses sont celles qui restent d’actualité. Au cours des semaines et des mois à venir, nous nous en servirons régulièrement et continuerons à les compléter de manière systématique. Désormais, nous recommencerons toutefois à utiliser les canaux de communication habituels. Merci pour votre attention.

Luc Cortebeeck, président de la CSC
Claude Rolin, secrétaire général de la CSC

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